
Scène surréaliste ce 21 juin 2025 à Saintes. En pleine fête de la musique, des représentants de la mairie accompagnés de policiers municipaux ont exigé qu’un drapeau palestinien soit enlevé. Le coupable, s’exhibant fièrement sur le devant d’une scène musicale, a dû être décroché, car « il présente un risque à l’ordre public ». Alors qu’un génocide est en cours, perpétué en partie grâce aux armes vendues par la France à Israël, le problème c’est un drapeau palestinien à Saintes…
Ôtez ce drapeau palestinien à Saintes que je ne saurais voir !
Au Salisbury, lieu où se tenait un des concerts, un stand antifasciste était présent. Stickers, drapeaux, badges : tout y était pour signifier qu’un moment de joie collective est aussi politique. C’était aussi le moment idéal pour affiner la solidarité symbolique des saintais·es à la cause palestinienne, génocidée à Gaza par Tsahal. La culture et la musique étant résolument des moyens d’expression de fraternité envers les peuples en lutte. Et ici, l’expression de notre soutien indéfectible aux palestinien·nes était visible également par un drapeau palestinien accroché près du stand antifasciste.
Avec des menaces à peine voilées et une mise sous pression des organisateurs, des représentants de la mairie accompagnés de policiers municipaux, ordonnent de retirer le drapeau. Un ordre suivi à contrecœur par les responsables du concert, pour préserver malgré tout cette soirée. Une preuve de plus que la police ne pourra jamais être réformée, jamais considérée comme une potentielle alliée, ou que le fameux « ils ne sont pas tous pareils » est un non-sens, aussi bien politique que moral.

Une répression finalement banale dans une démocratie qui n’en est plus une
Cet ordre, et les menaces qui vont avec, ne sont pas anodins, ni exceptionnels. Ces exactions sont le fruit d’une dynamique évidente, présente même dans des moments culturels comme la Fête de la Musique : la fascisation de notre société.
Glissement vers une démocratie illibérale
Un glissement lent, mais certain, vers une démocratie illibérale s’opère depuis quelques années. Ce terme, popularisé par Fareed Zakaria dans les années 90, est un régime où il y a des élections, mais où l’alternance est rendue difficile par la mainmise des institutions par un groupe ou un parti dominant (cf. la victoire du NFP).
D’abord académique, le concept connaît un nouveau souffle lors des années 2010-2020 avec l’arrivée d’Orban au pouvoir en Hongrie, puis est repris par les opposants de gauche au régime macroniste.
Les éléments révélateurs d’une démocratie illibérale
- L’affaiblissement des contre-pouvoirs.
- Un pouvoir exécutif concentré.
- La justice et son indépendance attaquées.
- Des libertés publiques restreintes.
- L’utilisation du cadre légal pour limiter l’opposition (de gauche de préférence…).
- La criminalisation du soutien à la lutte palestinienne à coups « d’apologie du terrorisme ».
- L’État d’urgence permanent pour interdire les manifestations indésirables.
- Les violences policières.
- Les arrestations préventives.
- L’interdiction d’une conférence de Jean-Luc Mélenchon pour trouble à l’ordre public.
- La main mise du pouvoir et des mécènes d’extrême droite sur les grands médias.
Il est évident que notre démocratie représentative va mal et que la démocratie illibérale est déjà là.
Du jamais vu en France ! |
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Toujours ce samedi 21 juin, une mobilisation était prévue contre la tenue du Salon du Bourget, près de Paris qui accueille les vendeurs d’armes du monde entier, y compris israéliens. Nous vous invitons à lire l’article de Contre Attaque à ce sujet. Des syndicalistes, des écologistes, des féministes, des membres de partis, de collectifs et d’organisations se trouvaient dans la Bourse du Travail de Bobigny, et s’apprêtaient à tenir une conférence de presse avant le départ en manifestation. C’est alors que des dizaines de policiers en armes ont pénétré en force dans le bâtiment syndical ! La BRAV-M et des policiers cagoulés siégeaient devant l’entrée. Jamais en France, une telle opération n’avait eu lieu ! Cette provocation, insoutenable, n’ayant qu’un seul but : terroriser le mouvement anti-guerre et empêcher toute mobilisation contre le salon de l’armement du Bourget. |
Un drapeau palestinien face au capitalisme
Dans un climat où un simple drapeau devient criminel, nous pensons que le message est clair : vous ne devez pas vous opposer aux intérêts capitalistes.
Faites silence pendant qu’on vous opprime !
Vous ne devez pas manifester trop fort, trop bruyamment. Vous devez vous taire, et accepter la soumission à l’ordre établi. Ne soyez pas solidaires des peuples opprimés, tapez plutôt sur les musulmans ou les chômeurs, « la vraie plaie de notre société ».
Si arborer un simple drapeau palestinien est passible d’amende, ou d’annulation de spectacle, c’est précisément parce que l’État capitaliste ne supporte pas la conscience de classe et la solidarité des peuples. Comprenez, si vous remettez en cause l’ordre établi dans un autre pays, combien de temps avant que vous le fassiez ici !
Ne vous trompez pas d’ennemi, les seuls coupables sont les bourgeois et le capitalisme !
Comme toujours, les vrais coupables sont la bourgeoisie et les capitalistes. Qu’ils soient du PS, de droite ou d’extrême droite (RN), le capitalisme et son rouleau compresseur sont les seuls à blâmer.
Ne l’oublions pas, ce sont eux qui :
- Ont criminalisé la solidarité avec les Palestiniens, pendant qu’ils armaient Israël.
- Continuent de commercer avec Netanyahou. pendant que Gaza est rasée, sous couvert de « coopérations stratégiques ».
- Ont réprimé dans la violence le mouvement des Gilets Jaunes, éborgné, matraqué, emprisonné des milliers de manifestants.
- Veulent encore et toujours « passer les cités au Karcher », en criminalisant les quartiers populaires au nom de la « sécurité ».
- Ont laissé crever l’hôpital public, détruit les services sociaux, cassé le droit du travail, tout en offrant des milliards d’aides publiques aux grandes entreprises.
- Ont censuré les mouvements étudiants, expulsé les campements des universités, et tenté de faire taire toute pensée critique.
- Ont organisé les rafles antimigrants de cette semaine, pour jeter des humains sous OQTF dans les CRA (centres de rétention administrative) avant expulsion.
Ce ne sont ni les musulmans, ni les juifs, ni les chômeurs, ni les syndicalistes, ni les militants de gauche, ni les jeunes en lutte qu’il faut blâmer. Le seul ennemi, c’est le capital et ceux qui le servent. Et tant que la colère ne sera pas dirigée contre lui, elle ne changera rien.
Pour info |
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Concernant « l’opération place nette » de Bruno Retailleau, un communiqué commun dénonce cette traque xénophobe et raciste. Le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, le Collectif d’action judiciaire, le Gisti (Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés) et d’autres organisations qui demandent de longue date la suppression des contrôles administratifs, ont introduit un recours devant le Conseil d’État en vue de suspendre cette instruction. |
Sortons notre drapeau palestinien et résistons !
C’est justement contre tout ce climat de répression de l’opposition de gauche qu’il nous faut entretenir cette flamme et ce moment culturel qu’est la fête de la musique. C’est un des derniers bastions populaires dans lesquels l’art, les messages et discours de classe, de solidarité, fraternité sont encore visibles.
Nous ne devons pas baisser la tête, à Saintes ou ailleurs, parce que c’est bien les idées que l’on porte en nous, que Retailleau et sa clique ne pourront jamais briser, alliance avec le RN ou pas.
La démocratie même assiégée n’appartient qu’à ceux qui l’habitent. On doit continuer à bâtir le mouvement de solidarité envers toutes les luttes. Chaque discussion, chaque post partagé, chaque tweet ; c’est un petit grain de sable dans l’engrenage capitaliste, une fraction d’humanité reprise au productivisme !
Répression des soutiens au peuple palestinien : une exception française ?
Depuis octobre 2023, les soutiens à la cause palestinienne sont de plus en plus criminalisés. Les gouvernements invoquent le maintien de l’ordre public, la lutte contre l’antisémitisme ou encore la sécurité nationale pour justifier des restrictions disproportionnées.
Tour d’horizon de la censure en Europe

⬛ Palestine
🟩 Pays ayant reconnu l’État de Palestine
⬜ Pays n’ayant pas reconnu l’État de Palestine
Si 147 pays reconnaissent l’État de Palestine, dont dernièrement, l’Espagne, l’Irlande, la Norvège ou encore la Slovénie et l’Arménie, la plupart des pays européens vouent allégeance à l’État sioniste.
Dans 12 États membres de l’UE, les autorités ont pris des mesures disproportionnées : manifestations interdites « par précaution », recours excessif à la force, climat d’intimidation généralisé. Cela concerne notamment l’Autriche, la France, l’Allemagne, la Suède, la Pologne, ou encore l’Italie.
Dans au moins 7 de ces États, la répression s’est accompagnée de gaz lacrymogènes, de chiens policiers, de nasses, voire d’agressions physiques. Autant de pratiques contraires aux standards internationaux des droits humains.
Les exemples concrets d’exaction sont légions
- Au Royaume-Uni,le gouvernement britannique prévoit d’interdire le groupe non-violent Palestine Action en vertu de la loi antiterroriste.
- Ce 5 juin 2025, Google a censuré une pétition contre le financement d’institutions israéliennes, lancée par la coalition universitaire européenne pour la Palestine.
- À Berlin, des dizaines de rassemblements ont été interdits, même ceux organisés par des associations juives antisionistes.
- En France, le Conseil d’État a refusé de suspendre la circulaire du ministère de l’Intérieur visant l’interdiction des manifestations pro-palestiniennes. Rappelant toutefois que seuls les préfets peuvent décider d’interdire ou non une manifestation locale. Préfets, précisons-le nommés par Macron, qui interdissent à tour de bras les rassemblements, y compris les veillées silencieuses ou les marches symboliques.
- Toujours en France, des arrêtés municipaux sont pris pour interdire le drapeau palestinien. Fort heureusement, la tribunal administratif a tranché : la mesure est illégale !
Ailleurs dans le monde, États-Unis, Canada, Inde : une censure aussi globale
- Aux États-Unis, plusieurs campus ont vu leurs campements pro-palestiniens évacués par la force, parfois avec des centaines d’arrestations (cf. Columbia, UCLA).
- Au Canada, des enseignants ont été suspendus pour avoir exprimé leur soutien aux civils palestiniens.
- En Inde, pays allié à Israël, les rassemblements pro-palestiniens sont systématiquement interdits.
Des poches de résistance partout
Malgré la répression, les résistances ne faiblissent pas. Partout en Europe et au-delà, des individus, des collectifs, des institutions refusent de céder au silence imposé.
- Des syndicats et organisations juridiques comme la Ligue des Droits de l’Homme, le Syndicat de la magistrature, Amnesty International, etc., continuent de saisir les tribunaux pour défendre le droit de manifester.
- De nombreux lieux culturels indépendants maintiennent concerts, conférences ou expositions en soutien à la Palestine, parfois hors du cadre légal.
- Des drapeaux palestiniens sont brandis dans les parlements (Italie, France, etc.) par des députés courageux ou encore dans les stades de foot (Parc des Princes en France, stade Mendizorroza en Espagne, etc.).
- À l’échelle diplomatique, certains pays prennent position en reconnaissant officiellement l’État palestinien, provoquant la colère du gouvernement israélien.
- En Espagne, le Pays Basque reste un bastion historique de résistance internationaliste. Des villes comme Bilbao ou San-Sebastian n’hésitent pas à hisser le drapeau palestinien sur leurs bâtiments publics.

Pour rappel ! |
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Rappelons que le 1er ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a été frappé d’un mandat d’arrêt par la Cour Pénale Internationale (CPI) le 21 novembre 2024 pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. L’enquête de la CPI alléguant sa responsabilité dans « le crime de guerre de famine comme méthode de guerre et les crimes contre l’humanité de meurtre, de persécution et d’autres actes inhumains » pendant la guerre à Gaza. 124 États membres de la CPI, dont la France, sont désormais tenus d’arrêter Netanyahu s’il entrait sur leur territoire. |
Le drapeau palestinien, un test démocratique
Ce qui se joue ici dépasse la cause palestinienne. C’est un baromètre de la santé démocratique d’un pays. Si hisser un drapeau, chanter une chanson ou brandir une pancarte devient un délit, alors il n’y a plus de démocratie digne de ce nom.
Ce ne sont pas les idées qui sont dangereuses, ce sont les régimes qui en ont peur. Et à La Guillotine Saintaise, on compte bien défendre nos idées encore longtemps !